Le syndicat n’a pas encore débattu de cette notion, nous publions ce point de vue pour favoriser la réflexion de chacun-e et pour en débattre lors de notre prochaine assemblée générale.

Le revenu de base. Une idée qui devient une nécessité.

Cette idée fait suite à une demande d’amis syndicalistes, devant mon insistance à répéter qu’il faut promouvoir le revenu de base.

Pour ceux qui l’ignoreraient encore, le revenu de base ou revenu universel est « un revenu versé par une communauté politique à tous ses membres, sur une base individuelle, sans conditions de ressources ni obligation de travail, selon la définition du Basic Income Earth Network (BIEN) ». Nous n’entrerons pas dans les détails, mais précisons que ce concept recouvre des significations diverses, tant il y a de variantes possibles, par exemple en ce qui concerne l’âge des bénéficiaires, ou le montant distribué. L’auteur de ces lignes précise donc qu’il s’agit ici d’une somme permettant de vivre dignement, soit à peu près 1000 à 1100 euros par mois, ce montant étant valable pour la France en cette fin d’année 2014. Il nous paraît indispensable de pouvoir payer son loyer, la nourriture, les transports etc et d’en garder un peu pour les loisirs ou la culture sans devoir jouer les acrobates comme les Rmistes à la fin du mois…

Bien entendu des objections s’élèvent. Quid du financement d’une telle idée ? Quid de la désertification des usines, ateliers et bureaux ? Sans parler de l’oisiveté que cela risque d’engendrer, et de ses conséquences néfastes. Et on pourrait trouver d’autres choses encore.

Bien que l’objet de cet article ne soit pas de répondre à ces questions, ayons quand même en mémoire quelques chiffres. D’après un rapport d’OXFAM , les 85 personnes les plus riches du monde possédaient autant fin 2013 que les 50% de la population la plus pauvre. A l’échelle de la planète, cela signifie que 85 personnes possèdent autant de richesse que 3,5 milliards de pauvres. Et selon cette organisation les 1% les plus riches possèdent près de 50% de la richesse mondiale . Si l’on y adjoint les économies réalisables au niveau de service comme la CAF ou Pôle emploi ; l’évasion fiscale, les intérêts de la dette ( il y a tant à dire sur la dette française…!)… La concrétisation ne semble pas impossible au niveau économique en France…

Le problème de la « désincitation au travail » en est-il un ? Si l’on en croit certaines expériences au Canada ou en Namibie , c’est plus un serpent de mer qu’une réalité. Dans le documentaire sus mentionné, à la question ; « Si vous aviez un revenu de base, est-ce que vous iriez encore travailler ? »: 60 % des personnes interrogées répondent « oui comme avant », 30 % répondent « oui mais »,; et 10 % répondent : « D’abord dormir, ensuite on verra. ». Il ne vous reste plus qu’à poser la question à votre entourage…Il est également précisé dans ce sondage: « En revanche, 80 % se disent persuadées que les autres ne travailleront plus »…
De quoi être rassuré : Les usines continueront à tourner, les champs d’être cultivés et les magasins d’êtres approvisionnés, les ordures d’être ramassées!… Faisons donc confiance aux autres

(Et aussi à ceux qui infamie ! Ne veulent pas travailler, ou plus exactement veulent commencer par dormir…)

Il y a un autre obstacle non encore mentionné à cette idée décidément utopique. Une variante du « Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front ». Autrement dit « j’ai souffert pour gagner ma vie, et il est hors de question que d’autres la gagnent sans rien faire !». C’est peut-être l’obstacle le plus difficile à négocier dans la diffusion de cette idée de revenu de base. i. Ne négligeons cependant pas la force des habitudes et de la résignation. Cette question du sacrifice[1] est au coeur du du problème, du moins quant aux réticences « psychologiques » ; Nous sommes tellement conditionnés à payer pour obtenir quelque chose ( c’est-à-dire de quoi vivre…!) qu’il est aujourd’hui difficile de concevoir les choses autrement…

Si le revenu de base était mis en place, le risque existe que celui ci ne soit détourné: à l’instar de l’APL [2] qui permet à certains de s’enrichir, les loyers devenant plus élevés… De là à se passer de cette belle idée ! Nous n’y voyons que la « résilience » du système libéral, cette capacité à tout récupérer et digérer sans que rien ne change vraiment concernant le partage des richesses… Bien sûr il convient d’être attentif dans la mise en oeuvre du revenu de base pour éviter qu’il ne serve à enrichir ceux qui ne savent plus quoi faire de leur richesse… Mais pour l’auteur de cet article, ce n’est pas l’idée du revenu de base qui est mauvaise, c’est le système économique dans lequel nous sommes enfermés qui est pervers !

Comment aider financièrement les femmes et/ou les hommes ayant décidé de ne pas travailler ( au sens ou certains l’entendent…) pour élever leurs enfants, celles ou celui qui s’occupent d’un membre de la famille qui est malade ou plus âgé, les étudiants-es qui ne viennent pas d’une famille aisée et qui n’ont pas une santé leur permettant de mener de front études et job pour s’en sortir, les artistes en herbe qui ont besoin de plusieurs années pour acquérir la maîtrise technique de leur art, les bénévoles de tant d’associations … ? A moins de mettre en place une usine à gaz, le revenu de base nous apparaît être le plus simple.

Nous terminons par ceci : Pour les plus anciens souvenez-vous ! Quelques décennies avant l’an 2000, dans les années 60 ou 70 et peut-être avant, on nous disait ou on pensait : En l’an 2000, nous ne travaillerons presque plus. Nous aurons beaucoup de loisir car les machines feront le travail à notre place. Maintenant que nous y sommes, on se plaint qu’il y a du chômage ! Un visionnage d’un montage sur youtube (3 millions de chômeurs [3]) permettra de vous en convaincre. Voir se succéder Chirac, Giscard d’Estaing, Mauroy, Beregovoy… affirmer que tout sera mis en ouvre pour combattre le chômage et voir celui-ci continuer à grimper inexorablement devrait pouvoir faire réfléchir les plus endurcis… Comme le signale et le répète Paul Jorion sur son blog,[4] le travail disparaît ( et on a tout fait pour…). Qui peut croire que la situation va s’améliorer et que l’on créera suffisamment d’emplois pour tout le monde ? Nous laissons le lecteur vérifier que le taux de chômage réel aux USA aujourd’hui est d’environ 20%. En France les chiffres véritables doivent être du même ordre. Comme le mentionne Olivier Delamarche dans une vidéo , pour une économie basée sur la consommation, ce sont des taux insoutenables. Le partage du temps de travail est une nécessité, mais n’est certainement pas incompatible avec le revenu de base, lequel à notre avis, permettrait précisément cette évolution souhaitable.

Diffuser cette idée nous apparaît nécessaire. Et urgent.

Notes :

1. Il y a d’autres appellations :revenu citoyen, revenu d’existence, allocation universelle et bien d’autres…
2. Définition donnée sur Wikipédia. Le BIEN est Le Basic Income Earth Network (BIEN), en français Réseau Mondial pour le Revenu de Base. Voir « le revenu de base » (Wikipédia).
3. Voir le documentaire « le revenu de base » de Daniel Häni et Enno Schmidt.
4. Voir http://www.oxfam.org/sites/www.oxfam.org/files/file_attachments/cr-even-it-up-extreme-inequality-291014-fr.pdf ( p 13)
5. Voir http://www.oxfam.org/fr/salle-de-presse/communiques/2014-01-20/avec-des-regles-commerciales-faussees-la-croissance. « Cette appropriation des chances par les riches au détriment des classes pauvres et moyennes a conduit au fait que sept personnes sur dix vivent dans des pays où les inégalités se sont creusées depuis les années 1980, et aujourd’hui, dans le monde, 1 % des ménages possèdent 46 % des richesses (110 000 milliards de dollars). »
6. Le concept a été expérimenté par le Programme Mincome dans les années 1970 à Dauphin-ville (Manitoba) au Canada75. Les résultats de cette expérience, pendant longtemps non étudiée, ont finalement montré que la désincitation au travail y avait été très faible durant la durée de l’expérience (quatre ans) ( Wikipédia : Le revenu de base).
7. Une expérimentation a été menée en Namibie, dans le secteur de Otjivero – Omitara (environ 1 000 personnes à 100 kilomètres de Windhoek) 84. Elle consiste à distribuer chaque mois pendant deux ans (à partir du premier janvier 2008) à chaque habitant enregistré 100 dollars Namibiens.… Le chômage a également diminué dans le village. ( Wikipédia : Le revenu de base).

8. De très belles pages ont été écrites sur le sacrifice que l’auteur qui assume son côté « spiritualiste » ne mentionnera pas ici…
9. Voir la partie critiques du revenu de base de Wikipédia ::http://fr.wikipedia.org/wiki/Revenu_de_base
10 Voir https://www.youtube.com/watch?v=IdBkEoab-Z4
11 Voir http://www.pauljorion.com/blog/

[1]     De très belles pages ont été écrites sur le sacrifice que l’auteur qui assume son côté « spiritualiste » ne mentionnera pas ici…

[2]     Voir la partie critiques du revenu de base de Wikipédia ::http://fr.wikipedia.org/wiki/Revenu_de_base

[3]     Voir https://www.youtube.com/watch?v=IdBkEoab-Z4

[4]     Voir http://www.pauljorion.com/blog/